Les voies de communication que constituaient les lacs et rivières
situées dans le Bouclier canadien et dans les régions
avoisinantes revêtaient une importance vitale aux yeux des
Bouclériens récents de l'ouest. Comme leurs
prédécesseurs, les Bouclériens moyens, ces gens
auraient été dépendants des embarcations;
probablement le canot en écorce de bouleau même si aucune
trace de cet élément de la technologie n'a survécu
dans l'enregistrement archéologique. Les voies fluviales les plus
importantes ont tendance à être orientées dans l'axe
est-ouest. Par exemple, la haute rivière des Outaouais rejoint le
lac Huron, ensuite le lac Supérieur et, en direction ouest, la
rivière Winnipeg et le lac Winnipeg, en empruntant les
systèmes aquatiques limitrophes de l'Ontario et du Minnesota.
Depuis cet axe est-ouest, plusieurs voies donnaient accès à
la baie d'Hudson vers le nord, vers l'ouest par l'intermédiaire de
la rivière Saskatchewan et, au sud, par la rivière Rouge.
Les conditions instables de l'environnement ont favorisé la
propagation des Bouclériens récents de l'ouest vers les
régions de la rivière Rainy et de la rivière Winnipeg,
vers l'ensemble du Manitoba et la région du nord du Manitoba, et la
Saskatchewan près de The Pas. Ces régions étaient
originellement occupées par les Planussiens mais la croissance de
la température humide et fraîche entre 1 500 et 500 avant J.-C.
(Buchner 1979) était propice
à une expansion significative de la forêt boréale vers
le sud-ouest et l'ouest aux dépens des régions des
forêts-parcs et de ses troupeaux de bisons. Comme le bison se
déplaça vers l'ouest avec le rétrécissement
des prairies, les chasseurs planussiens de bisons abandonnèrent
de grandes aires qui, à l'est, ont été
subséquemment réoccupées par les chasseurs et les
pêcheurs bouclériens récents de l'ouest qui, eux,
étaient adaptés à la forêt.
Il y a consensus sur le fait que les Bouclériens récents
de l'ouest étaient issus des Bouclériens moyens
antérieurs. Les occupations par les deux groupes culturels
surviennent fréquemment sur les mêmes sites, soit en
couches stratifiées ou, sur la rive nord du lac Supérieur,
isolées les unes des autres sur des terrasses
surélevées par le rebondissement isostatique,
procédé selon lequel la croûte terrestre reprend
son ancienne position après avoir été
comprimée depuis longtemps par le poids massif de la calotte
glaciaire. Comme on l'a déjà fait remarquer, la grande
partie de l'extrême sud-ouest du nord de l'Ontario, le Manitaba
limitrophe et tout le centre-est de la Saskatchewan avaient
été auparavant occupés par les Planussiens moyens
à la fin de la Période III. La chronologie du remplacement
culturel a constitué un sujet de controverse. Les
Bouclériens récents de l'ouest (Laurelliens) introduisirent
la poterie dans la région et une grande partie du débat a
porté sur l'antiquité de la poterie et la validité
de leurs datations par le radiocarbone. En partant de l'hypothèse
selon laquelle la poterie des Bouclériens récents de
l'ouest a été obtenue des GL-St-Laurentiens récents
par diffusion depuis les bas Grands Lacs
(Wright 1972a : 59), on a
estimé que son introduction dans le Bouclier canadien aurait eu
lieu dès 700 avant J.-C. Ceci présuppose que la poterie
la plus ancienne est survenue le long de la frontière sud-est de
la distribution des Bouclériens récents de l'ouest.
D'autres considèrent que la région de la rivière
Rainy constitue le point d'origine de la poterie la plus ancienne
(Reid and Rajnovich 1991 :
228). Par contre, la plupart des archéologues sont d'opinion que
la première apparition de la poterie et, par conséquent,
la transformation du Bouclérien moyen en Bouclérien
récent de l'ouest ont eu lieu vers 200 à 300 avant J.-C.
(Buchner 1979;
Dawson 1983;
Reid and Rajnovich 1991).
Cependant, les données du radiocarbone sont encore assez
équivoques pour que les archéologues inventent des
raisons ingénieuses pour rejeter ou accepter les datations
reliées à leur propre hypothèse de travail.
Par exemple, sur la base d'un grand nombre de datations
récentes obtenues par le radiocarbone, on a même
argumenté que les Bouclériens récents de
l'ouest ont été, pendant 300 ans, contemporains des
Algonquiens du nord de la Période V (complexe de Blackduck)
(Reid and Rajnovich 1991)
contrairement à l'enregistrement physique compris dans les sites
stratifiés et la séparation des deux cultures sur
différentes terrasses élevées par l'effet du
rebondissement isostatique le long sur la rive nord du lac
Supérieur. Il est suffisant de dire qu'il y a consensus sur
le fait que les Bouclériens récents de l'ouest aient
été les ancêtre des Saulteux (Ojibway) et des Cris
de l'ouest. Il est opportun de remarquer que la distribution du
Bouclérien récent de l'ouest à la Période
IV coïncide, à la Période V, avec la distribution
des Algonguiens du nord, dont on a fait mention
antérieurement.
Pendant approximativement le premier tiers de la Période IV
(1 000 à 500 avant J.-C.), le Bouclérien récent
de l'ouest est inséparable de la base ancestrale du
Bouclérien moyen de la Période III. Vers 500 avant J.-C.,
et probablement antérieurement dans la partie sud-est de la
distribution culturelle, plusieurs changements technologiques ont eu lieu.
La poterie a été introduite et, à la même
époque, l'arc et la flèche semblent avoir
généralement remplacé le propulseur. Ce dernier
développement a assuré la poursuite d'un processus qui
a débuté sur la côte est vers la fin de la
Période III. Les tendances technologiques observées
à l'époque du Bouclérien moyen se maintiennent,
notamment la croissance des effectifs d'une grande variété
de formes de grattoirs, la décroissance en nombre de couteaux
bifaciaux, la rareté ou l'absence d'outils polis, l'usage de
cuivre natif pour le façonnage d'une variété
d'articles utilitaires et ornementaux, l'occurrence fréquente
de nodules d'ocre rouge, la production incessante d'éclats
linéaires, et l'apparition sporadique de poids de filets en
pierre. Cependant, contrairement à la situation du
Bouclérien moyen antérieur, une riche technologie d'outils
en os a réussi à survivre sous la forme de couteaux munis
d'incisives de castor, des alènes, des harpons à tête
basculante, et des articles de moindre importance, notamment des
aiguilles pour tresser des raquettes à neige, des perles, et des
décorateurs à poterie. Des découvertes
récentes dans le centre-nord du Manitoba laissent maintenant
croire qu'une industrie élaborée de l'os a existé
autrefois chez les Bouclériens moyens (David Riddle, Historic
Resources Branch of the Department of Culture, Heritage and Citizenship,
Manitoba : Communication personnelle).
Les efforts pour reconstituer l'histoire des Bouclériens
récents de l'ouest ont eu tendance à surestimer
l'importance de la poterie. Paradoxalement, l'assemblage de l'outillage
en pierre taillée dans la plupart des régions est plus
diagnostique et constitue donc un repère culturel plus fiable
que la poterie. Cette dernière affirmation peut ne pas
s'appliquer à la région Boundary Waters entre le
Minnesota et l'Ontario. Il n'est pas possible d'évaluer cette
question de façon adéquate car les grandes collection
provenant de Boundary Waters correspondent à des
dépôts mélangés mis au jour par des
fouilles dans des tumulus funéraires et de dépôts
minces de sites d'habitation à composantes multiples dans
lesquelles, contrairement à la plupart des sites des
Bouclériens récents de l'ouest, la poterie dépasse
en nombre l'outillage en pierre.
Les vases minutieusement modelés, soigneusement
lissés, montés à l'aide de colombins, à
base conoïde, à dégraissant en grès, et
décorés à l'aide d'instruments dentelés
partagent plusieurs caractéristiques avec la poterie des
complexes saugeeniens et pointe-péninsuliens des
GL-St-Laurentiens récents situés dans la
région des Grands Lacs. Les techniques de décoration
de la poterie comprenaient l'impression, dans la pâte humide,
de divers outils dentelés avant cuisson ou en utilisant un
mouvement de va-et-vient avec des outils dentelés et à
bord rectiligne. Il y a, cependant, des différences entre la
poterie des Bouclériens récents de l'ouest et celle
de leurs voisins à l'est, sauf celle dans la région
de l'est du territoire des Bouclériens récents de
l'ouest, les plus proches voisins du territoire des GL-St-Laurentiens
récents qui ont été si influencés par
les styles de poterie de leurs voisins qu'il est fréquemment
difficile de distinguer les deux groupes seulement sur la base des
caractéristiques de la poterie. Dans cette région, en
particulier, il faut se fier à l'outillage en pierre pour
arriver à une attribution culturelle précise.
Les activités de subsistance des Bouclériens
récents de l'ouest doivent habituellement se déduire
de la localisation des sites car, dans la plupart des cas, les sols
acides ont détruit tous les os. Le site Heron Bay sur la rive
nord du lac Supérieur constitue une exception
(Wright 1967). À cet
endroit, les vestiges abondants de castor et d'original ont
été récupérés et correspondaient
à des effectifs inférieurs à ceux du caribou,
du rat musqué, diverses espèces de lièvre et
de l'ours. Le ménomini rond, l'omble, l'esturgeon des lacs,
le brochet nordique, le cotostome noir à long nez, et le
doré jaune ou le doré noir ont été
identifiés parmi les restes de poisson. La conservation des os dans
ce site est due au fait que l'acide a été
neutralisé par le sodas (cendres de bois) engendré par
les nombreux feux de camp. Des restes fauniques ont aussi
été récupérés du site Long Sault
dans la zone de végétation des Grands-Lacs-Saint-Laurent
de la rivière Rainy
(Arthurs 1986). Les restes de
grands mammifères étaient représentés par
l'orignal et le chevreuil ou caribou. On note aussi la présence
de restes de chien. Le castor dominait la catégorie des petites
mammifères alors que le rat musqué, diverses
espèces de lièvre, le porc-épic et la martre
faisaient aussi partie de l'enregistrement. Le poisson était
important dans ce site et l'esturgeon figurait en première
place. Dans la même région, d'autres sites ont produit
des os de bison indiquant l'accessibilité des
forêts-parcs situées à courte distance à
l'ouest ou, peut-être, la pénétration même
du bison dans la région immédiate.
La plupart de sites fouillés représentent des occupations
de saison chaude alors que de nombreux groupes de gens s'assemblaient
à chaque année. De tels sites ont tendance à se
situer le long des grandes rivières et des séries de
lacs et particulièrement à l'embouchure des
rivières et dans le voisinage de rapides produisant des
étangs propices à la pêche. Une
caractéristique des modes d'établissement qui semble
seulement s'appliquer à la partie sud-ouest de la distribution
des Bouclériens récents de l'ouest est la
proximité de grands lits de riz sauvage. Indubitablement les
innombrables petits camps étaient parsemés dans tout
l'arrière-pays afin de chasser et d'acquérir certains
matériaux, notamment une pierre de haute qualité pour
le façonnage des outils, l'écorce de bouleau pour les
canots et pour les tentes et les contenants, diverses espèces
de bois pour une variété d'outils, des baies et d'autres
plantes pour des fins très variées dont des fins
médicinales. Sauf les sites de carrière, ces sites
à ressources spécifiques sont extrêmement
difficiles à localiser et à identifier quant à
leurs fonctions. Les modes d'établissement hivernaux sont
inconnus mais on présume qu'ils correspondaient à la
dispersion de petits groupes familiaux emportant, jusque dans leurs
territoires de chasse lors de la température froide, leur
réserve de nourriture accumulée au cours de
l'automne.
Les informations concernant la cosmologie des Bouclériens
récents de l'ouest, quoique nombreuses à certains endroits,
sont très inégales quand il s'agit de leur culture en
général. Dans la partie sud-ouest de leur territoire, les
gens participaient à l'élaboration des
cérémonies des tumulus funéraires adoptées
d'une culture intermédiaire située dans le sud, à
savoir la culture de Malmo qui, elle, les tenaient des Hopewelliens
situés encore plus au sud. La construction de tumulus incorporant
des sépultures secondaires multiples en faisceaux et une absence
généralisée d'offrandes mortuaires placées
directement près des défunts sauf l'ocre rouge,
reflètent des valeurs locales concernant les procédures
d'enterrement appropriées qui sont plutôt
différentes de celles du complexe hopewellien. Les tumulus
funéraires eux-mêmes et certaines caractéristiques
spécifiques, notamment la récupération des cerveaux
et de la moelle des os longs, dédoublent des
caractéristiques du sud. À part les sépultures
mortuaires, le seul autre site de sépultures qui appartient
probablement aux Boulériens récents de l'ouest est le site
Arrowhead Drive sur l'île Bois Blanc dans le nord du Michigan
(Bettarel and Harrison 1962).
Là une fosse de sépulture contenait les principaux restes
articulés d'un bon nombre d'individus. Parmi les offrandes se
trouvaient un vase en poterie, un sac d'instruments, une mandibule
d'ours aménagée, et des cones d'hématite, les
deux derniers articles représentant des caractéristiques
culturelles hopewelliennes.
Au moins quelques fosses énigmatiques construites de
galets qui ont été découvertes dans le
sud-est du Manitoba
(Carmichael 1981) et,
en particulier, sur la rive nord du lac Supérieur
(Dawson 1981) sont
attribuées aux Bouclériens récents de l'ouest.
Ces structures, généralement situées à
des endroits isolés exposés aux éléments,
ont été interprétées comme des
structures cosmologiques qui permettaient aux individus d'obtenir,
par le jeûne, la contemplation et la prière, un esprit
gardien ou une prophétie. On peut aussi démontrer
qu'une partie de l'art rupestre du Bouclérien canadien
appartient peut-être aux Bouclériens récents
de l'ouest.
Les voisins des Bouclériens récents de l'ouest
étaient les GL-St-Laurentiens récents à l'est
et, au nord, les Paléoesquimaux moyens, les gens de la culture
de l'Intérieur du Nord-Ouest (phase récente) (le
complexe de Taltheilei), les Planussiens récents à l'ouest
et au sud-ouest, et plusieurs autres groupes culturels situés
dans les Hauts Grands Lac et, plus à l'ouest, la culture de North
Bay et de Malmo entre autres. Les liens avec les GL-St-Laurentiens
(les complexes de Pointe-Péninsule et de Saugeen, en particulier)
semblent avoir été très étroits, en
particulier naturellement, avec les bandes situées plus à
l'est. Il est probable que les caractéristiques décoratives
de la poterie mélangée récupérée dans
les sites des Bouclériens récents de l'ouest,
reflètent les mariages qui ont eu lieu entre les
Bouclériens récents de l'ouest et les GL-St-Laurentiens
récents dont les femmes, artisanes traditionnelles de leur poterie,
auraient déménagé dans la bande de leur mari.
Certainement dans les sites bouclériens récents de l'ouest,
tel que le site Heron Bay,
(Wright 1967), et les sites des
GL-St-Laurentiens récents, tels que Donaldson
(Wright and Anderson 1963),
les caractéristiques des styles de poterie des deux cultures ont
été trouvées en association directe les unes avec
les autres indiquant que des mariages avaient eu lieu entre membres des
bandes appartenant à ces cultures. De tels liens de parenté
auraient favorisé le déplacement de biens tels que le cuivre
natif entre les différents groupes culturels. De la même
façon, à l'ouest, la poterie des Bouclériens
récents de l'ouest et occasionnellement des articles en cuivre
du lac Supérieur se trouvent dans des sites des Planussiens
récents dans le sud-ouest du Manitoba
(Syms 1977) alors que la
calcédoine de la rivière Knife du Dakota Nord et, moins
fréquemment, l'obsidienne de Wyoming trouvée dans des sites
des Bouclériens récents de l'ouest auraient
été transigées par l'intermédiaire des
Planussiens récents. Les liens avec le nord sont ténus. On
a suggéré que la présence limitée des
Bouclériens récents de l'ouest dans le bassin de la
rivière Churchill dans le nord du Manitoba (lac Southern Indian)
était due à son occupation par les gens de la culture de
l'Intérieur du Nord-Ouest (phase récente) (complexe de
Taltheilei)
(Dickson 1980). Près de
la jonction de la rivière Winnipeg avec le lac Winnipeg, la
récupération d'un fragment d'une lampe ou bol perforé
en stéatite
(Mayer-Oakes 1970 : 25)
permet de croire à une forme de contact avec les
Paléoesquimaux moyens sur la côte de la baie d'Hudson
grâce à la rivière Nelson. Si un certain amalgame
ded styles de poterie des Bouclériens récents de l'ouest
et ceux de la culture de Malmo du centre du Manitoba
(Wilford 1955) et
peut-être de la culture de Summers Island du nord du Michigan
(Brose 1970) a eu lieu, les liens
semblent être d'une nature générale plutôt
que spécifique. L'outillage en pierre de ces deux cultures du
sud, par exemple, n'a clairement aucune parenté avec celui
des Bouclériens récents de l'ouest. Il y a encore
moins d'indices d'une interaction significative avec la culture de
North Bay de Door Péninsula située dans le nord du
Wisconsin
(Mason 1966). En ce moment,
les liens externes les plus importants du Bouclérien
récent de l'ouest semble absolument être avec leurs
voisins à l'est dans les Bas Grands Lacs et à l'ouest
dans les forêts-parcs et la prairies du Manitoba et du Dakota
Nord.
En dépit des fouilles de plusieurs tumulus funéraires des
Bouclériens récents de l'ouest en Ontario et les
régions avoisinantes du Minnesota, on a peu d'information sur
la biologie humaine. L'information est soit non disponible dans les
publications ou bien la conservation des os était faible et
les contextes archéologiques si confus que les
interprétations de l'anthropologie physique ont été
gravement compromises. Le seul rapport concernant la biologie humaine des
Bouclériens récents de l'ouest provient de 19 individus des
sites Smith Mound 3 et Smith Mound 4 situées dans le nord du Minnesota
(Ossenberg 1974). Même
ces restes étaient si fragmentés et dans un si
piètre état de conservation que seulement quatre des 26
caractères des crânes utilisés pour
déterminer le lien de parenté des populations n'ont pu
être mesurés, affaiblissant donc gravement les
observations pertinentes à l'héritage
génétique des gens et leurs liens biologiques avec
d'autres gens. Il fut cependant possible de croire que les gens du
complexe de Blackduck de la Période V, les Algonquiens nordiques
du sud du Manitoba, du centre-nord du Minnesota et des régions
voisines de l'Ontario étaient les descendants directs de la
population locale de Bouclériens récents de l'ouest
(Ibid : 37).
Pour la majorité des Bouclériens récents de
l'ouest, la structure sociale semble n'avoir subi aucun changement
significatif depuis celle des Bouclériens moyens, leurs
ancêtres de la Période III. Les mêmes
unités flexibles de la famille nucléaire
reliées par une affiliation lâche aux bandes qui
englobaient les liens avec les bandes adjacentes agglutinées
par les mariages mixes, ont pu, croit-on, avoir été
pertinentes. Cependant, dans la région du sud-ouest du
territoire des Bouclériens récents de l'ouest et, en
particulier, dans la région de la rivière Rainy en
Ontario et au Minnesota, il semble avoir eu une déviation
sociale significative par rapport à la norme culturelle.
Les grands sites de rassemblement impliquant plusieurs bandes sur
les rives de cette rivière et des régions
avoisinantes contiennent des tumulus funéraires
proéminents. La plupart des tumulus furent construits en
plusieurs étapes. Leur construction et leur entretien
dans le temps laissent croire à un niveau d'organisation
sociale et à l'allocation d'une autorité qui
était indubitablement étrangère à
la plupart des sociétés des Bouclériens
récents de l'ouest. Cette autorité aurait
été investie dans des chamans-prêtres
puissants qui auraient dirigé les procédures,
notamment la perforation des crânes et des os longs, la
chronologie des cérémonies de l'enterrement et la
construction périodique des tumulus. En plus de
l'influence du système funéraire hopewellien dans
la région de la rivière Rainy, les ressources
exceptionnellement riches en riz sauvage et en esturgeons semblent
y avoir permis une densité de population et un degré
de sédentarité que les bandes moins pourvues
économiquement étaient dans l'impossibilité
d'atteindre. La situation locale exceptionnelle doit avoir
conduit à une sorte de stratification sociale car une
fraction de la population méritait de se faire enterrer
dans un tumulus. En terme de stratification sociale, l'explication
la plus risquée de ce raisonnement est que la technologie du
traitement et de l'entreposage du riz sauvage a rendu soudainement
riches en nourriture un certain nombre de familles détenant
des titres de propriété eu égard à des
lots particuliers de terre. Cette situation, à son tour,
aurait permis à ces familles en particulier d'utiliser leur
richesse alimentaire nouvellement acquise pour se
différencier de leurs voisins moins fortunés et
d'imiter le rituel élaboré du complexe
funéraire hopewellien en provenance du sud. Quels que soient
les facteurs qui ont provoqué l'émergence de la
société inégale, le fait qu'une sorte de
différenciation ait eu lieu, se dédudit du nombre
limité de tumulus funéraires et de leur distribution
restreinte. La tradition locale des tumulus funéraires s'est
poursuivie à le Période V. Il y a aussi un
enregistrement ténu indiquant que la région de la
rivière Rainy ait pu avoir fonctionné comme un lieu
d'échange régional où un nombre de
différentes cultures auraient interagi pour leurs
bénéfices mutuels.
Les limites de l'enregistrement disponible concernant les
Bouclériens récents de l'ouest sont les mêmes
que celles qui affectent toutes les occupations du Bouclier
canadien : la visibilité archéologique
très réduite sauf pour les grands sites de camps
de base lors des saisons chaudes; l'absence
généralisée d'os en raison de l'acidité
des sols; le mélange désespérant des
occupations composantes avec des occupations antérieures ou
postérieures; la contamination des échantillons de
radiocarbone avec les acides humiques, les feux de forêt et
les contextes archéologiques peu définis. En outre,
certains problèmes particuliers sont liés à
l'étendue géographique exceptionnelle des
Bouclériens récents de l'ouest et les processus mis
en cause dans l'expansion de la poterie. La poterie, médium
plastique sur lequel plusieurs gestes culturellement
déterminés dont le modelage et les techniques
décoratives deviennent de façon permanentes
figées dans l'argile cuite, fournit aux archéologues
un objet particulièrement sensible à la
sériation et à d'autres manipulations analytiques
requises pour reconstituer l'histoire culturelle. Les vases en
poterie aussi se brisent en plusieurs tessons et sont relativement
indestructibles et ainsi revêtent une haute visibilité
archéologique. Malheureusement la poterie peut aussi agir
comme une "fossile directeur" simpliste selon lequel les
archéologues sont inclinés à faire des
affirmations culturelles et temporelles basées seulement sur
la poterie tout en ignorant essentiellement le reste de
l'enregistrement comparatif. Une telle approche limitée,
conjointement avec l'esprit de clocher toujours présent en
archéologie, a entraîné des conflits
d'interprétations concernant les liens entre les poteries.
Des perceptions différentes sont apparentes depuis l'est de
l'Ontario et le Québec, depuis le nord du Michigan, le
Wisconsin,, et le Minnesota, et depuis le Manitoba et le centre-est
de la Saskatchewan. Même des tentatives de reconstitutions
plus élargies, notamment la sphère interactive
hopewellienne ou le concept des couches sud, moyennes et nord du
Sylvicole moyen souffrent des perspectives régionales
étroitement définies.
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