Les Grands-Lacs-Saint-Laurentiens anciens
(Somaire, Chapitre 6)
En raison des données
limitées, tous les commentaires concernant la phase ancienne
de la culture des Grands-Lacs-Saint-Laurent (GLSaint-Laurentien ancien)
peuvent se résumer dans un sommaire. Le nom plutôt
lourdaud de "Grands-Lacs-Saint-Laurent" désigne la région
qui a été occupée par cette culture et qui comprend
le lac Érié, le sud du lac Huron, le lac Ontario, et la
vallée du Saint-Laurent en amont de la ville de Québec.
C'est une région de basses terres bordant le Bouclier canadien
situé au nord. La province végétative durant la
partie récente de la Période II était la forêt
des Grands-Lacs-Saint-Laurent sauf pour une partie importante de l'ouest
de l'Ontario méridional où prévalait la forêt
de feuillus
(McAndrews et al. 1987).
Non seulement cette région comprend de nos jours les fermes les
plus riches de l'Ontario et du Québec mais c'est aussi la
région la plus densément peuplée. La proposition
d'une formation ancienne de la culture des Grands-Lacs-Saint-Laurent
est plus une hypothèse de travail qu'une entité
démontrable. En effet, le concepteur du concept d'Archaïque
laurentien, désigné ici par la culture des
Grands-Lacs-Saint-Laurent (le GLSaint-Laurentien), restreindrait son
application à la Période III (4 000 à 1 000
avant J.-C.)
(Ritchie 1971). Alors que les
données archéologiques pour une culture ancienne des
Grands-Lacs-Saint-Laurent pré-datant 4 000 avant J.-C. sont
faibles, il y a une base à la présomption qu'une telle
reconstitution culturelle sera éventuellement
démontrée. Cette présomption repose sur les
prémisses que (1) les larges pointes de projectile à
encoche baso-latérales sont associées à des sites
datés approximativement à 5 500 avant J.-C.
(Funk 1965;
Wellman 1974); (2) sur
l'existence d'un ensemble de sites de l'Archaïque moyen qui,
plus tôt dans cette région, partageaient certains traits
de pierre taillée avec le GLSaint-Laurentien
(Thomas and Robinson 1980);
(3) et sur le fait que le GLSaint-Laurentien mieux connu de la
Période III a dû se développer à partir de
population ancestrale locale en l'absence de données indiquant
l'intrusion d'une population. Ainsi, le GLSaint-Laurentien ancien ou,
comme il est aussi connu, le Proto-laurentien s'est
développé in situ à partir d'une base culturelle
de l'Archaïque moyen
(Funk 1988 : 17). Les sites
pertinents de l'État de New York, datés entre 5 500
et 5 000 avant J.-C., comprennent des pointes de projectiles larges
à encoches baso-latérales, des grattoirs et des racloirs,
des couteaux bifaciaux, et des outils grossiers en pierre mais semblent
manquer d'instruments en pierre polie
(Funk 1988 : 26). Cet outillage
simple en pierre taillée a une grande distribution dans l'est de
l'Amérique du Nord. Comme on l'a déjà noté,
dans cette distribution "... des frontières rigides ne peuvent
être tracées pour les cultures ou les complexes
archéologiques" et "En l'absence d'importantes barrières
géographiques ou écologiques aux déplacements des
traits ou des gens, les traits individuels varient
généralement de façon fréquente en effectifs
et distribution à l'extérieur du territoire où les
regroupements ont été d'abord remarqués par les
archéologues"
(Funk 1988 : 34). Comme le
complexe précédent de l'Archaïque moyen, l'outillage
en pierre taillée du GLSaint-Laurentien ancien n'est pas
distinctif de celui du GLSaint-Laurentien moyen. Il manque aussi les
lames de hache en pierre polie, les couteaux, les pointes, les lances
et les pesons régionalement distinctifs de la culture
subséquente de la Période III. Comme d'autres l'ont
noté (Funk 1988;
Tuck 1976), les outils diagnostiques
en pierre polie du GLSaint-Laurentien moyen semblent avoir
été en fait adoptés par les Maritimiens anciens
et moyens du golfe du Saint-Laurent. Ainsi, contrairement à la
faible visibilité typologique de la technique simple et largement
répandue de la pierre polie des GLSaint-Laurentiens anciens,
l'addition de catégories d'outils en pierre polie
régionalement distinctifs au cours du GLSaint-Laurentien moyen
permet l'identification culturelle même lorsque les objets sont
sortis de leur contexte archéologique. C'est probablement pour
cette raison que les données reconnues des GLSaint-Laurentiens
anciens sont si éparpillées contrairement au
témoignage abondant de leurs descendants qui ont adopté
des outils en pierre polie. Cette difficulté a été
de plus compliquée par le fait que plusieurs sites des
GLSaint-Laurentiens sont inondés par les eaux des Grands Lacs
et du lac Champlain et sont ou détruits par l'érosion
ou profondément ensevelis sous les sédiments.
Il est malheureux qu'on connaisse si mal cette période critique
de la région des Grands-Lacs-Saint-Laurent. Il suffit de
répéter que le GLSaint-Laurentien ancien souffre de
la même absence de visibilité typologique que son
prédécesseur le complexe de l'Archaïque moyen. Ce
fut cependant dans ces bases culturelles éphémères
du point de vue de l'archéologie que reposa le témoignage
beaucoup plus détaillé de la Période III.
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