Tout comme d'autres peuples de la côte septentrionale, les Haïdas croyaient que les âmes des morts se rendaient d'abord dans le monde céleste au cours de leur cycle de réincarnation. On pouvait faciliter le voyage tant des prières que des âmes en faisant s'élever de la fumée depuis le foyer central de la maison ou depuis des pipes. Avant les contacts, les Haïdas employaient du tabac local. Le fait de fumer la pipe en est venu à être fortement associé aux pouvoirs extraordinaires attribués à l'origine aux Européens, particulièrement aux armes à feu, qui non seulement dégageaient de la fumée, mais causaient instantanément des blessures ou la mort. Nombre des premières pipes étaient faites avec le bois de noyer de crosses de fusil et de pièces de canon de fusil afin de s'emparer du pouvoir des armes et de le transférer aux pipes.

La forme du Corbeau (avec la tête d'un autre oiseau sur sa queue) de cette pipe en bois à fourneau en laiton est très semblable à celle du Corbeau d'un hochet, sauf qu'il n'y a pas de figure humaine sur son dos. Achetée en 1976 à Douglas Ewing, de New York. MCC VII-B-1659 (S92-4313)

À une certaine époque, l'argilite a remplacé les pièces de fusil recyclées dans la fabrication des pipes, mais les spécialistes ont eu du mal à déterminer une date pour le début de la sculpture de pipes en argilite. L'archéologue Knut Fladmark, de l'Université Simon Fraser, a fait un pas en découvrant la sépulture d'un chef à l'intérieur d'un plancher de maison de Lawn Hill, sur la côte est au sud de la pointe Rose. Une pipe en argilite sculptée avec soin montrant une palourde portant un visage humain a été retrouvée dans cette sépulture, que des marchandises de troc associées datent d'avant 1820.

Après les mâts totémiques, les sculptures en argilite sont probablement le moyen d'expression artistique le mieux connu des Haïdas. Eux seuls réalisaient des œuvres en argilite, car ils contrôlaient les réserves de cette pierre noire tendre, que l'on trouvait dans le ruisseau Slatechuck, sur un flanc de montagne près du village de Skidegate. On trouve de l'ardoise argileuse ailleurs sur la côte nord-ouest, mais celle des environs de Skidegate, qui est d'un noir lustré, est unique. Skidegate contrôlait les réserves d'argilite, mais ce sont des artistes de Masset qui ont produit parmi les plus célèbres pièces en cette matière. On trouve près de Masset, sous forme de grosses pierres de surface, une variété très inférieure de cette pierre, qui est rouge avec des inclusions jaunâtres tachetées. Les œuvres faites avec cette pierre peuvent être considérées comme provenant à coup sûr de cet endroit, car elle n'était utilisée que par des artistes de Masset qui trouvaient parfois peu commode de se rendre à Skidegate pour s'y procurer de l'argilite noire de haute qualité.