Le front intérieur, 1917

Le 30 janvier 2015

L’ours en peluche qui accompagnait le lieutenant Lawrence Rogers sur les champs de bataille est si petit qu’il peut entrer dans une poche. Il s’agit d’une mascotte élimée aux oreilles pendantes et à la bouche brodée au point de croix que le lieutenant avait reçue de sa fille de 10 ans, Aileen. La petite lui avait envoyé cette peluche en espérant qu’elle le protègerait dans les tranchées de la Première Guerre mondiale, mais en vain : le lieutenant Lawrence Rogers a été tué à Passchendaele.

Aujourd’hui, la mascotte figure parmi les artefacts du nouveau module intitulé Le front intérieur, 1917, qui montre à quel point la guerre a touché la société canadienne et les familles restées au pays. Il constitue une mise à jour importante de l’exposition permanente portant sur la Première Guerre mondiale au Musée canadien de la guerre.

« Il est très difficile de trouver des artefacts pour le module, car les familles ont conservé surtout les lettres venant d’outre-mer ou les objets ayant appartenu aux soldats. Nous avons toutefois des histoires très poignantes à raconter aux visiteurs », fait remarquer Mélanie Morin-Pelletier, historienne de la Première Guerre mondiale et conservatrice.

Le front intérieur, 1917, qui accueillera les visiteurs dès le 19 février 2015, enrichit l’exposition permanente consacrée à la Première Guerre mondiale. Il décrit de quelle façon le conflit a changé la société dans des domaines précis : la politique, l’économie, l’industrie et la vie familiale.

« Ce qui s’est passé sur les champs de bataille a entraîné des répercussions sur la vie au pays et vice-versa, explique Mme Morin-Pelletier. De nombreux événements ont suscité des changements durables qui ont marqué les années subséquentes, et même l’époque actuelle. »

Le front intérieur, 1917 brosse un tableau de la crise de la conscription, entre autres. On y expose comment le premier ministre sir Robert Borden, qui avait promis de ne pas présenter le projet de loi, a changé d’avis en 1917 lorsqu’il s’est aperçu que le nombre important de soldats canadiens tués en Europe avait largement dépassé celui des recrues volontaires. Le module relate le débat virulent qui a entraîné des émeutes au Québec et des mouvements de résistance ailleurs au pays. Il explique la décision de sir Robert Borden d’accorder le droit de vote aux femmes dont un proche parent était à la guerre, dans l’espoir de garantir son succès électoral.

Le droit de vote des femmes — étendu à toutes les femmes britanniques d’âge adulte en 1918 — est un héritage durable de la guerre. L’impôt sur le revenu a été une autre mesure prise pendant la guerre; certes moins populaire, mais tout aussi durable.

L’ours en peluche d’Aileen, porte-bonheur abîmé, témoigne d’une expérience humaine intemporelle. « De tels objets constituent un lien direct avec la Première Guerre mondiale », indique Mme Morin-Pelletier. « Et encore aujourd’hui, ils sont associés aux familles dont des membres partent pour servir outre-mer, et qui, dans certains cas, ne reviendront jamais. »

Image : Buy thrift stamps. Affiche pour une collecte de fonds, 1918
MCG 19890086-898
© Musée canadien de la guerre