À L'Assaut

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Les quatre heures qui suivent, vous dormez profondément, rarement interrompu, ne vous réveillant qu’une seule fois pour gratter les poux qui se sont fait un nid dans vos cheveux.

– «Allez, debout, mon gars!», entendez-vous au loin. «Debout là-dedans!», entendez-vous encore tandis que vous ouvrez les yeux sur le visage familier du lieutenant Denonville, au-dessus de vous.

– «Viens avec mois. J’ai besoin de toi tout de suite!», explique-t-il d’une voix pressée. Vous vous assoyez d’un geste sur votre couche et frottez vos yeux.

– «Lieutenant?», interrogez-vous d’une voix rauque.

– «Les Allemands préparent une attaque, en fin de matinée», explique-t-il.

– «Quelle heure est-il?» demandez-vous à moitié endormi.

– «Un peu après quatre heures… Écoute-moi bien. On a découvert que les Allemands vont attaquer dans quelques heures. Les hommes se préparent à l’assaut, mais ça me prend plus
d’hommes pour la sape

À ces mots, vous recouvrez tous vos sens. De fait, l’une des choses les plus difficiles que peut devoir faire un soldat est de creuser un tunnel loin sous la surface du No Man’s Land pour déposer une charge d’explosifs près des tranchées ennemies. Vous avez entendu plusieurs histoires de soldats mis en pièces par une mine ennemie ou, pire encore, enterrés vivants par l’effondrement d’un tunnel.

– «Pas de temps à perdre à bayer aux corneilles!» avertit le lieutenant Denonville; «Vas trouver le caporal Meloche, dans le tunnel Gaspé, et aide-le à mettre les explosifs en place. Grouille-toi, chaque minute compte!»

Laissant sur place votre sac et votre fusil, vous sortez de l’abri et courrez jusqu’au tunnel Gaspé.  Arrivé là, vous voyez de longues files d’hommes sales, suants et couverts de poussière de craie transportant de la terre hors du tunnel et y amenant des douzaines de boîtes remplies d’explosifs. Vous vous frayez un chemin jusqu’à l’intérieur du tunnel et, un quart d’heure plus tard, arrivez dans un étroit cul de sac.

– «Caporal Meloche?», demandez-vous d’un ton las.

– «C’est moi!» réplique un homme courtaud et chauve couvert des pieds à la tête de boue crayeuse.

– «Le lieutenant Denonville m’envoie», expliquez-vous.

– «Bien! Prends cette pelle et creuse!», lance-t-il. «Je dois retourner à la surface et, quant je reviens, je veux voir au moins dix pieds de plus de tunnel. Au travail!»

Saisissant le première pelle qui soit à votre portée, vous commencez à empiler la terre crayeuse dans des brouettes, lesquelles sont promptement emportées à la surface. Pendant plus d’une heure, vous creusez à la lumière vacillante d’une lanterne.

Soudain, vous entendez du bruit provenant directement du mur, devant vous. De l’autre côté de la paroi du tunnel, vous entendez, étouffé, un bruit de grattement.